JUSTICE PIP: Jean-Claude Mas demande pardon, mais défend toujours son gel

Depuis le début du procès PIP, Jean-Claude Mas arrondit son image, mais n’en démord pas sur l’innocuité de ses implants frauduleux.
AFP - 26 avr. 2013 à 19:31 - Temps de lecture :
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Il déambule dans la salle des pas perdus, discute avec une victime sur un coin de table, demande pardon à celles qu’il accusait de porter plainte «pour le fric».

Après une entame très procédurale il y a dix jours, l’audience a examiné cette semaine le fond de l’affaire: la tromperie sur le contenu des prothèses, aggravé selon l’accusation par les risques qu’elle fait courir aux dizaines de milliers de femmes qui les portent.

Une fraude établie et reconnue par les cinq prévenus. Mais un seul, l’ancien responsable de la R&D au sein de PIP, Thierry Brinon, estimait que le gel maison utilisé pour remplir les prothèses était dangereux, car plus enclin que d’autres à engendrer des siliconomes en cas de fuite.

Trois autres anciens cadres de la société mis en cause disent qu’ils ignoraient les risques.

Jean-Claude Mas maintient, lui, que son gel était inoffensif, alors que le dernier bilan de l’Agence des produits de santé (ANSM) fait état de plus de 4100 ruptures, de près de 2.700 femmes souffrant d’inflammations et d’un taux de «défaillance» de 25% constaté sur les implants retirés préventivement depuis le début du scandale.

A la barre du tribunal correctionnel qui juge cette affaire jusqu’au 17 mai, un inspecteur de l’ANSM ayant mis au jour la tromperie dans le Var en mars 2010 a fait de l’explantation le principal danger pour les porteuses. La faute au gel maison et à une transsudation trop importante, fragilisant l’enveloppe des implants jusqu’à la rompre.

Les prévenus soutiennent au contraire que c’est l’enveloppe, non le gel, qui est en cause. L’avocat de l’un d’eux avance même la piste d’une mauvaise stérilisation des implants.

De quoi désemparer les victimes, qui n’obtiennent pas les réponses aux questions qu’elles se posent sur la nocivité du silicone qu’elles ont encore dans le corps.

«Est-ce que l’un d’entre vous peut me regarder dans les yeux et me dire que je ne risque rien dans dix ans?» lance Sandrine aux prévenus. Face au silence, elle conclut: «Apparemment pas.»

Parce qu’elle veut aussi «savoir», une autre des 5.200 plaignantes aborde Jean-Claude Mas alors qu’il boit un café, jeudi, assis à une table lors d’une suspension d’audience. Celui-ci, très provocateur en garde à vue, montre un visage plus amène depuis le début du procès.

Donnant du «Madame Afssaps» et du «Monsieur TÜV» aux avocats de l’autorité sanitaire et du certificateur allemand, il répond calmement aux questions. Aux victimes qu’il avait considérées avec mépris en garde à vue, il présente même des excuses. Du bout des lèvres mercredi devant le tribunal, avant de leur demander pardon pour la tromperie de PIP quand la présidente lui donne la parole vendredi à la fin des débats.

Pas question pour lui, cependant, d’admettre une quelconque nocivité de ses implants, tandis que les porteuses défilent à la barre pour raconter leurs souffrances. Souvent, l’explantation et l’angoisse se sont ajoutées à la maladie. Mais selon les pouvoirs publics, rien n’indique un risque accru de cancer à ce jour, une vaste étude épidémiologique devant être lancée sur dix ans.

Reste que pour les plaignantes, l’incertitude n’a plus place. «Nous entendons beaucoup de choses, mais vous oubliez la plus importante, ce que vivent les victimes. De quelle vérité parle-t-on ici, celle des tests effectués sur des lapins? J’ai vu de mes propres yeux les ravages de votre gel», lance Alexandra Blachère, présidente d’une association, l’une des dernières victimes à s’être exprimée à la barre vendredi.

Le procès se poursuivra lundi après-midi avec les premières plaidoiries de parties civiles.

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