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Hollande - Ayrault : le pouvoir paralysé

François Hollande et Jean-Marc Ayrault à l'Élysée, en mai 2013. Abaca/Pool/ABACA

Le gouvernement renonce à mettre en place l'écotaxe. Un nouveau recul après celui, dimanche, sur la fiscalité des produits d'épargne. Le couple exécutif est désormais asphyxié par la montée des mécontentements.

Le gouvernement a encore plié. Comme il avait déjà plié dimanche sur la fiscalité des produits de l'épargne, et avant cela sur les frais de scolarité, l'excédent brut d'exploitation, etc. En annonçant la «suspension» de l'écotaxe sur tout le territoire, Jean-Marc Ayrault a confirmé ce que beaucoup dans la majorité redoutaient déjà depuis plusieurs jours: l'action du gouvernement est désormais paralysée, asphyxiée par la fureur de quelques-uns et le mécontentement d'une majorité de Français.

À l'issue de la réunion à laquelle avaient été conviés mardi matin les élus bretons, le premier ministre a eu à cœur de défendre sa décision. «Le courage, a-t-il dit au cours de sa courte déclaration, ce n'est pas l'obstination, c'est d'écouter, de comprendre, de rechercher la solution.» Pour lui, «suspension n'est pas suppression». Il veut «prendre le temps nécessaire» pour que l'écotaxe soit «corrigée». Combien de temps au juste? «Plusieurs mois», assure le ministre délégué aux Transports Frédéric Cuvillier. «Nous voulons trouver des solutions rapidement», dit-on à Matignon sans avancer de calendrier précis.

Ajourner l'entrée en vigueur de la taxe poids lourds ou la vider de sa substance en accordant de nouvelles exonérations à la Bretagne et à d'autres régions? Depuis plusieurs jours, quelques élus et ministres avaient plaidé pour la première option auprès de l'Élysée. Matignon, en revanche, a plus longuement hésité. Lundi après-midi, lors de la réunion hebdomadaire des directeurs de cabinet, un proche collaborateur du premier ministre tentait encore de minimiser l'ampleur de la mobilisation des professionnels bretons. Présent à cette réunion, le directeur de cabinet du ministre de l'Intérieur Manuel Valls, beaucoup plus inquiet de la situation, faisait valoir du tac au tac: «La situation est grave! On n'a pas vu ça depuis dix ans!» La décision finale de suspendre l'écotaxe a été prise lundi, dans la soirée, en liaison bien sûr avec l'Élysée. «On sait bien qu'elle n'est pas à l'origine des maux de la Bretagne et de la France, mais elle cristallisait tellement de mécontentements qu'il fallait reporter sa mise en œuvre», argumente un conseiller d'Ayrault.

« Le courage, ce n'est pas l'obstination, c'est d'écouter, de comprendre, de rechercher la solution »

Jean-Marc Ayrault

La classe politique dans son ensemble a veillé à ne pas trop accabler le premier ministre. Le président de l'UMP, Jean-François Copé, qui réclamait le report de l'écotaxe, s'est dit «soulagé» par la décision du premier ministre. Le président de l'UDI, Jean-Louis Borloo, qui avait porté cette taxe sous Sarkozy, y a vu «un geste d'apaisement». Mais le recul du gouvernement est une douche froide pour les alliés écologistes du PS. «C'est plus qu'un coup dur pour l'écologie, c'est le coup qui tue», s'emporte le député Noël Mamère. Conscient de la gravité de la situation politique, la majorité des écolos veillent toutefois à ne pas étaler trop ostensiblement ses états d'âme.

La décision finale de suspendre l'écotaxe a été prise lundi à Matignon, en liaison avec l'Élysée. Abaca/ABACA

Quant aux socialistes, ils sont sonnés et s'interrogent sur la suite des événements. «Deux reculades en deux jours, ça commence à faire beaucoup», s'inquiète un député. «Beaucoup d'entre nous se posent désormais une question: Jean-Marc Ayrault incarne-t-il encore la réforme ou est-il mort?», s'interroge-t-il. Chacun y va de son conseil. Alors que Jean-Marc Ayrault s'envole mercredi soir pour un déplacement de deux jours en Russie, certains l'invitent à livrer au plus tôt une «bataille politique» qui lui permettrait de revenir sur les réformes qu'il a conduites, notamment la celle des retraites. D'autres, dans la majorité, lui conseillent de reprendre la main en lançant d'autres réformes, «quatre réformes structurantes» précise François de Rugy, coprésident du groupe EELV à l'Assemblée nationale. Dans l'attente de la riposte éventuelle du premier ministre, tous ne peuvent que constater que le programme législatif des prochaines semaines ne permettra pas, en l'état, au premier ministre de reprendre la main. De fait, les textes en cours d'examen (le PLF ou le PLFSS) ou à venir ne sont pas de nature à rassembler la majorité. Pas plus que la loi sur le cumul des mandats qui doit revenir en novembre à l'Assemblée nationale. Mais que proposer à six mois des élections municipales et à huit mois des européennes? «Pour le moment, assure un député, le premier ministre n'a guère d'autres solutions que de faire le dos rond.»

Hollande - Ayrault : le pouvoir paralysé

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367 commentaires
  • Le Rigolo

    le

    Le mieux serait la démission du président.

  • anne.chaunier

    le

    En lisant le commentaire sélectionné, on est
    en droit de penser que cet internaute
    (Louravi 1er) nous rappelle que l'on n'obtient rien par une manifestation pacifique; qu'ilfaut donc avoir à portée de mains les moyens de se faire entendre : et
    cela va loin ! jusqu'aux rues dépavées et aux
    barricades de Mai 68 de ma génération !
    Le respect de la vie de la jeunesse française
    était grand, à l'époque et aucun étudiant
    survolté n'a été tué par lapolice de l'époque
    (merci au chef de l'Etat et au Préfet qui avaient donné des ordres dans ce sens). Il
    n'y eut, je crois, qu'un individu tombé dans la
    Seine ! MAIS qu'en serait-il maintenant ??
    Le respect de la vie humaine a des racines
    philosophiques et spirituelles qui semblent
    avoir déserté l'esprit des hommes politiques
    qui nous "gouvernent" actuellement. Les
    pacifiques des manifestations contre le mariage pour tous ont été trop souvent
    malmenés sous le prétexte d'etre des "chrétiens conservateurs"....Cela en dit long
    sur la morale hollandiste.
    Alors comment trouver d'autres moyens de se faire entendre....

  • ARIK

    le

    Il faut qu'ils lisent d'urgence "Le pouvoir pour les nuls"

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