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Mur des cons : plainte contre le Syndicat de la magistrature pour destruction de preuve

Me Gilles-William Goldnadel (ici en 2010) a tenu à rappeler que les magistrats «prêtent un serment de neutralité et de modération». Sébastien SORIANO/Le Figaro

Avocat de plusieurs parties civiles, Me Gilles-William Goldnadel estime qu'en faisant disparaître le mur, le syndicat s'est débarrassé du corps du délit.

En pleine polémique sur le «mur des cons», des magistrats auraient-ils détruit sciemment une preuve? Révélé le 24 avril, ce mur avait, de fait, disparu deux jours plus tard des locaux du Syndicat de la magistrature. «Nous l'avons détruit», révélait le 27 avril Françoise Martres, la présidente du syndicat, dans un entretien au Parisien. Cette disparition de l'objet du scandale est-elle licite? Oui, si on considère, comme le soutient le syndicat, qu'il ne s'agit que d'une initiative strictement privée. Non, si on estime, comme l'affirme Me Gilles-William Goldnadel, qu'il s'agit d'une destruction de preuve dans le cadre d'une affaire qui «défraie la chronique» et est susceptible de déboucher sur une action judiciaire, l'avocat rappelant au passage que la garde des Sceaux avait déclaré, au moment même de la destruction du mur, que les personnes concernées «pouvaient porter plainte». Fort de ce raisonnement, Me Goldnadel dépose ce lundi une plainte à l'encontre du Syndicat de la magistrature pour «soustraction d'un objet de nature à faciliter la recherche de preuves».

Goldnadel est l'avocat de plusieurs parties civiles, notamment du journaliste de France 3, Clément Weill-Raynal, qui a filmé le mur à l'occasion d'une interview faite dans ce local du Syndicat de la magistrature. Il représente aussi Robert Ménard. Le fondateur de l'association Reporters sans frontières est l'un de ceux dont le visage a été épinglé sur le fameux mur des cons.

C'est en son nom que la plainte est déposée. «Lorsqu'il a appris qu'il figurait sur le mur, Robert Ménard a voulu le confirmer par constat d'huissier, mais, lorsque l'huissier que nous avons envoyé s'est présenté le 26 avril, le mur avait disparu des locaux du Syndicat de la magistrature», raconte Gilles-William Goldnadel. Selon ce dernier, cette disparition de preuve, assumée par des magistrats, est un comble de la part de ceux-là mêmes qui sont censés condamner des justiciables lorsqu'ils détruisent des preuves.

«Même un être humain normal sait que le corps du délit est un moyen de preuve», s'indigne Me Goldnadel. Certes, les documents vidéo sont sans doute suffisants pour constituer une preuve dans une éventuelle action judiciaire, mais le juriste ne s'arrête pas à ce point, qui sera tranché par le magistrat chargé d'instruire sa plainte. Il reviendra également à ce juge d'instruction le soin de déterminer si des plaintes avaient déjà été enregistrées au moment où la destruction du mur des cons est intervenue.

« De nombreux journalistes ont circulé à plusieurs reprises dans ce local. Dès lors que vous acceptez que des tiers puissent voir le mur, vous êtes dans la diffamation publique. »

Me Gilles-William Goldnadel

«En déposant une plainte pour destruction de preuve, Ménard et Goldnadel cherchent le moyen d'obtenir un procès en correctionnelle», décrypte un magistrat. Car, depuis le début de la polémique, rien n'indique que le scandale médiatique puisse se transformer en bras de fer judiciaire. Des juristes affirment que la manifestation d'opinions dans un espace privé ne peut pas constituer un délit. Elle ne pourrait au mieux que faire l'objet d'une infraction. C'est un point que conteste Me Goldnadel, qui a également déposé plainte pour diffamation. Il souligne qu'en l'espèce le local syndical ne peut pas être considéré comme un espace privé. «Il se trouve que de nombreux journalistes ont circulé à plusieurs reprises dans ce local. Dès lors que vous acceptez que des tiers puissent voir le mur, vous êtes dans la diffamation publique», rétorque-t-il.

L'avocat considère en tout cas que la polémique autour du mur des cons ne doit pas s'éteindre maintenant et veut en faire un exemple de la politisation excessive des magistrats. Devenu un croisé de la protestation contre l'idéologie de gauche qui, souligne-t-il, domine le Syndicat de la magistrature, il rappelle volontiers que les magistrats «prêtent un serment de neutralité et de modération». Mais, pour le moment, ces qualités ne sont attendues d'un magistrat que dans l'exercice de ses fonctions…

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