Publicité

Gens du voyage, Roms : des réalités bien différentes

FOCUS - L'expression «gens du voyage» ne désigne pas une population aux valeurs communes. C'est un statut administratif créé en 1969 et modifié à la marge en 2012 par le Conseil constitutionnel.

• Qui sont les «gens du voyage»? En France, on utilise indistinctement les termes «gens du voyage», «Roms» ou «Tsiganes» mais l'expression «gens du voyage» ne désigne pas une civilisation ou une population aux valeurs communes. C'est un statut administratif créé en 1969 et modifié à la marge en 2012 par le Conseil Constitutionnel.

Juridiquement, le terme «gens du voyage» qualifie les populations qui résident habituellement en abri mobile terrestre (caravanes, mobile-homes). Elles ont la nationalité française et sont en possession d'un titre de circulation. Les Roms ne rentrent pas dans cette catégorie administrative. Pour la commission nationale consultative des gens du voyage, les «Roms» sont «des étrangers, ressortissants de l'Union européenne», qui viennent principalement de Roumanie et de Bulgarie.

La notion «gens du voyage», qui évite l'«ethnicisation», n'est utilisée qu'en France et en Belgique. Les autres États de l'Union et les institutions européennes emploient le mot «Roms» pour désigner l'ensemble de leurs populations tsiganes. Cette appellation, qui signifie «homme» en langue romani, s'est généralisée dans les années 1970, au point de supplanter les autres termes.

Les communautés sont très diverses. En Andalousie et en Camargue, on parle de «gitans», une déformation d'«Égyptiens» car les premiers arrivés en Europe occidentale se disaient originaires de la «petite Égypte» (Grèce byzantine). Ceux qui ont vécu dans les pays germanophones, sont appelés «manouches» - ils sont présents en France depuis le XVe siècle - mais on parle aussi de «Bohémiens», de «Sintés», ou de «Tsiganes» (du grec athyinganis, «ceux qui ne touchent pas», car ils saluaient initialement en tenant les mains jointes).

• Combien sont-ils? D'après le recensement, la communauté des gens du voyage et des Roms est estimée entre 300.000 et 400.000 personnes. Le directeur de la fédération nationale des associations solidaires d'action avec les Tsiganes et les gens du voyage Stéphane Lévêque avance lui le chiffre de 400.000 à 500.000 gens du voyage et de 15.000 à 20.000 Roms.

Environ un tiers des gens du voyage sont restés itinérants, un tiers sont semi-sédentaires et un tiers sont sédentaires mais voyagent durant l'été. «Tous les gens du voyage ont un ancrage territorial affirmé qui s'accompagne de périodes d'itinérance, en particulier l'été», où la saison touristique bat son plein, observe Stéphane Lévêque. Les voyageurs sont souvent marchands ambulants, artisans ou saisonniers.

• Quelles obligations doivent-ils remplir? À partir de 16 ans, un membre de la communauté des gens du voyage doit être rattaché administrativement à une commune et être titulaire d'un titre de circulation. Pour l'être, il doit faire une demande motivée (pour raisons familiales ou professionnelles). Il est impossible de se rattacher à une municipalité dont le nombre de personnes issues de la communauté du voyage est supérieur à 3% de la population totale. Un recours contre cette disposition a été déposé devant la Cour européenne des droits de l'homme.

• Les titres de circulation. Jusqu'en 2012, le «livret spécial» pour ceux qui exercent une profession ambulante et leur famille coexistait avec le «livret», pour les retraités, salariés ou chômeurs et le «carnet de circulation» pour ceux qui n'avaient pas de ressources régulières. Ce dernier document a été abrogé par les Sages en octobre 2012.

Le «carnet» imposait les obligations les plus strictes. En plus de la taille, de la couleur des yeux et des signes particuliers, figurent également la couleur du teint et la corpulence de la personne. Il devait être tamponné tous les trois mois par la police. En cas de non-respect, le contrevenant risquait trois mois à un an de prison. Le Conseil constitutionnel a jugé que la fréquence des contrôles et les peines encourues étaient une «atteinte disproportionnée à l'exercice de la liberté d'aller et venir». Le fait que seuls les gens du voyage sans revenus fixes soient concernés par ces mesures constituait pour les Sages une «différence de traitement», et donc une rupture du principe d'égalité.

Les livrets spéciaux doivent eux être visés tous les quatre ans par une chambre consulaire. Le livret simple doit lui être visé chaque année par les forces de police. Ne pas se soumettre à ce contrôle est puni par une amende de 1500 euros. Le premier ministre, Jean-Marc Ayrault, a confié à l'ancien préfet de Mayotte Hubert Derache la rédaction d'un rapport sur l'amélioration des politiques publiques concernant les gens du voyage. Le gouvernement souhaite des propositions visant à supprimer le livret de circulation et à assurer la réalisation effective des aires d'accueil.

• Droit de vote: Pour accéder au droit de vote, depuis le jugement du Conseil constitutionnel, les gens du voyage disposent des mêmes droits que les autres Français, un rattachement à la commune ininterrompu de six mois suffit. Autrefois, on exigeait trois ans.

• La domiciliation. Les gens du voyage sont classés comme des «sans-résidence fixe», la caravane n'étant pas considérée comme un logement. Depuis 2000, une loi impose aux communes de plus de 5000 habitants de réaliser des aires d'accueil. Pour obtenir un emplacement, que l'on peut conserver pendant trois à neuf mois, il faut en faire la demande en mairie et payer une redevance. Toutefois les places sont rares : seules 52% des aires ont été mises en place fin 2010.

Gens du voyage, Roms : des réalités bien différentes

S'ABONNER
Partager

Partager via :

Plus d'options

S'abonner
47 commentaires
    À lire aussi