Chez Delphine Bürkli, les crocodiles sont en gélatine de couleur, avec un ventre en sucre blanc. Dans le marigot parisien, cela change un peu. La tête de liste UMP du 9e arrondissement accueillait dans sa permanence, mercredi 12 février, Jean-François Copé pour la deuxième étape de son « Paris municipales tour ». Une réunion avec des chips, des gobelets en plastique et surtout des militants de bonne humeur.
Le président de l'UMP a vivement encouragé la candidate qui connaît « très bien l'arrondissement et qui a toutes les qualités pour l'emporter ». Le 9e est acquis à la gauche depuis 2001, mais le maire sortant socialiste, Jacques Bravo, laisse sa place à une élue de 39 ans, Pauline Véron.
M. Copé veut croire dans les chances Delphine Bürkli : « Tu as la jeunesse, tu as le courage, tu incarnes le renouveau. » Le patron de l'UMP venait du 5e arrondissement où il avait soutenu son ancienne collaboratrice Florence Berthout, engagée dans une lutte fratricide contre Dominique Tiberi, et apportait ensuite son appui à la maire sortante du 17e, Brigitte Kuster.
« Ce sont trois filles solides qui incarnent vraiment la nouvelle génération UMP : trois super nanas », confie M. Copé qui relativisait, mercredi soir, le sondage paru dans Le Figaro du jeudi 13 février : selon cette enquête CSA également réalisée pour BFM-TV et Orange, les 10 et 11 février, la chef de file de l'UMP, Nathalie Kosciusko-Morizet, serait nettement battue au second tour dans le 14e arrondissement, par 45% des voix contre 55% à la socialiste Carine Petit. Exactement l'écart mesuré en novembre 2013 par Polling Vox pour Libération. La dissidente de l'UMP, Marie-Claire Carrère-Gée, soutenue par Charles Beigbeder, progresse à 4%, de 2 ou 3 points, selon les instituts.
« LE SEUL VRAI SONDAGE CE SERA IN FINE, LE VOTE. »
« Il ne faut quand même pas s'affoler, on y verra plus clair dans deux ou trois semaines », tempère le président de l'UMP qui avoue tout de même compter sur la démobilisation de l'électorat de gauche. Lors de la réunion dans le 5e – grosse bousculade dans la petite permanence – il a lancé : « Nathalie sait naturellement que nous sommes tous à ses côtés. » NKM a, elle aussi, minimisé l'importance des enquêtes d'opinion : « Moi, je ne surinvestis pas dans les sondages. Le seul vrai sondage ce sera in fine, le vote. »
Mais ce n'était pas elle la vedette, mercredi. M. Copé, troisième poids lourd de l'UMP à s'engager dans la bataille de Paris, après Nicolas Sarkozy lundi, et François Fillon par trois fois, en a profité pour asseoir sa position de chef de l'opposition. « Je commence à être un bon connaisseur de notre pays, des tours de France j'en ai fait plusieurs », a assuré le président de l'UMP pour expliquer qu'il n'était « pas là par hasard », dans cette permanence du 9e arrondissement, où NKM ne l'a pas suivie.
Il a donc sorti la grosse Bertha. Contre le gouvernement, en évoquant « des millions de Français indignés de son comportement, écrasés d'impôts » et contre quelques ministres. Manuel Valls, qui ne « s'effondre pas du tout dans les sondages à cause de Dieudonné » mais, selon lui, en raison de mauvais résultats en matière de sécurité. Vincent Peillon, le ministre de l'éducation nationale : « François Hollande a le droit d'en changer », a-t-il dit, en lançant une nouvelle offensive contre la réforme des rythmes scolaires, un sujet sensible à Paris.
« SOYEZ GENTILS, RAMENEZ-MOI LA VICTOIRE À PARIS ! »
Ses flèches les plus acérées, il les a réservées à la porte-parole du gouvernement, Najat Vallaud-Belkacem, fortement engagée dans la polémique qu'il a lancée sur le livre pour enfants Tous à poil, clivante à dessein. « Le prochain coup d'éclat de M. Copé va sans doute consister à amener tous les livres qui lui déplaisent dans une brouette puis les brûler en place publique », avait-elle déclaré sur RTL le matin. « Avoir fait la comparaison avec les autodafés de l'Allemagne nazie, c'est monstrueux. A force de parler tous les jours, elle a dépassé la mesure », a lancé M. Copé, qui l'a précédée dans ce poste.
Sa place à lui, en tous cas, il la voit « au-devant des troupes et pas à l'arrière ». Et pour qu'il n'y ait aucune ambiguïté sur son leadership, même dans la capitale, il a conclu : « Soyez gentils, ramenez-moi la victoire à Paris pour que, le soir du second tour, je puisse dire : “Nous avons reconquis toute la France et même Paris” ! » M. Copé sait évidemment combien cette victoire est difficile.
Cette visite dans trois arrondissements parisiens, et en premier lieu le 5e, qui inquiète beaucoup l'UMP, suscite l'ironie de Dominique Tiberi : « S'il pouvait venir plusieurs fois par semaine jusqu'au 23 mars, j'en serais ravi. Avec la photo de Philippe Goujon sur la permanence [de Florence Berthout], c'est une garantie pour moi de gagner des voix », veut-il croire.
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