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Quelles sont les sociétés qui ouvrent encore des usines en France ?

Malgré la crise, 139 créations de sites ont été annoncées depuis un an, qui redessinent la carte industrielle du pays.

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Publié le 03 avril 2014 à 11h54, modifié le 07 avril 2014 à 15h25

Temps de Lecture 5 min.

Après l’annulation par la compagnie Emirates, mercredi 11 juin,  l'A350 d’Airbus n’est désormais commandé qu’à 742 exemplaires contre 812 auparavant.

Bien sûr, vu des Etats-Unis, implanter une usine à Sury-le-Comtal n’avait rien d’évident. « Sury what ? » Pourquoi choisir cette commune de la Loire, à 25 km de Saint-Etienne ? Pourquoi même investir en France ?

« Aux yeux des Américains, il y avait beaucoup de choses défavorables », reconnaît Lieven Malfait, le Belge qui préside Unilin Insulation. Et d’énumérer « les contraintes d’environnement, les 35 heures, le coût élevé du travail, la baisse des mises en chantier… »

Mais les hommes d’Unilin ont plaidé leur cause. Le marché de l’isolation va fatalement remonter en France, ont-ils expliqué. Et pour l’attaquer, indispensable d’être sur place : les plaques de polyuréthane dont ils sont spécialistes ne se vendent pas au-delà de 500 kilomètres autour de leur lieu de production.

Mohawk, l’actionnaire américain d’Unilin, a donc donné son feu vert, et l’usine est sortie de terre. Un long parallélépipède gris au milieu de l’herbe verte. En rodage depuis quelques mois, elle devait être inaugurée jeudi 3 avril. Mieux : après cet investissement de 24 millions d’euros, qui devrait créer une cinquantaine d’emplois, la société a pris une option sur 4 hectares supplémentaires pour une extension. Champagne !

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139 CRÉATIONS D’USINES ONT ÉTÉ ANNONCÉES EN FRANCE

En pleine crise, alors que la France connaît une phase de désindustrialisation accélérée, de nouvelles usines continuent de fleurir. A Sury-le-Comtal. Mais aussi à Montataire (Oise), où Exa-Air a ouvert, le 1er avril, une unité d’emballages ultra-résistants. Ou encore à Sassenage (Isère). Biossun, une autre PME, doit y mettre en service dans quinze jours un site de pergolas.

En un an, d’avril 2013 à la fin mars 2014, quelque 139 créations d’usines ont été annoncées en France, auxquelles s’ajoutent 284 extensions de sites, selon les recensements effectués par la société Trendeo. Leur nombre est à peu près stable depuis le début de la crise, fin 2008.

« On note une très légère reprise depuis la mi-2013 », relève David Cousquer, de Trendeo. Sans doute un effet de l’amélioration des perspectives de production signalée par l’Insee. En 2009, quand tout s’est écroulé, Samson, un fabricant allemand de vannes industrielles, avait, par exemple, gelé un projet d’extension de son site de Vaulx-en-Velin (Rhône). Il a été relancé en 2012. Les nouveaux locaux seront inaugurés le 11 avril.

« POUR DEUX USINES QUI DISPARAISSENT, UNE SEULE EST CRÉÉE »

Ces investissements sont loin de compenser les fermetures. « Pour deux usines qui disparaissent, une seule est créée », constate M. Cousquer. La France reste considérée par les investisseurs comme un pays moyennement propice à la production manufacturière. Il se situe au vingtième rang mondial dans ce domaine, loin derrière la Malaisie, la Chine ou la Russie, selon le classement dévoilé en mars par la société d’immobilier Cushman & Wakefield.

L’Hexagone garde néanmoins des atouts. « C’est un pays riche, au cœur de l’Europe, sans grand risque, et disposant de bonnes infrastructures », détaille le PDG d’une multinationale. De quoi attirer encore certains investissements, en particulier de la part de PME et d’entreprises de taille intermédiaire, souvent familiales. Ce sont elles qui tirent l’emploi.

Mais les créations et les suppressions n’ont pas lieu dans les mêmes secteurs ni les mêmes régions. Si bien qu’une nouvelle France industrielle se dessine. Une France un peu rabougrie, dont le centre de gravité se déplace vers le Sud-Ouest.

ESSOR DE L’AÉRONAUTIQUE ET DU LUXE

Avec 93 nouveaux sites depuis 2009, les Pays de la Loire arrivent en tête des régions qui attirent l’industrie, devant Rhône-Alpes et l’Aquitaine, selon Trendeo.

Par rapport au socle industriel en place, la région Midi-Pyrénées est celle qui s’en sort le mieux. C’est la seule où, depuis 2009, les industriels ont annoncé autant de créations que de suppressions d’emplois. Partout ailleurs, le déclin est à l’œuvre. En particulier en Haute-Normandie, en Picardie et en Champagne-Ardenne, où à peine un emploi industriel supprimé sur trois est remplacé par un autre.

La crise semble avoir amplifié un phénomène plus ancien. Entre 1999 et 2010, « plus de 80 % des bassins d’emploi métropolitains ont perdu des emplois industriels », observe El Mouhoub Mouhoud, professeur d’économie à Paris-Dauphine, qui a analysé cette évolution pour le compte de Bercy. Les plus touchés étaient déjà « plutôt localisés au-dessus d’une ligne qui relie Le Havre et Marseille », note-t-il. A l’inverse, les zones dynamiques se situaient généralement au Sud et à l’Ouest.

Ce déplacement régional est en partie lié à l’essor de l’aéronautique, l’industrie qui, avec le luxe, s’est le plus développée ces dernières années. Toulouse, Nantes et Saint-Nazaire doivent une fière chandelle à Airbus et ses fournisseurs. A l’inverse, les déboires de l’automobile ont fortement pénalisé la banlieue parisienne.

L’ILE-DE-FRANCE SOUFFRE LE PLUS

L’Ile-de-France est, sur le papier, la région où l’industrie recule le plus. Tout n’y est pas perdu pour autant. Un exemple ? Septodont, le roi des anesthésiques utilisés par les dentistes. Cette entreprise familiale, qui domine le marché mondial, posera le 17 avril la première pierre d’une nouvelle unité sur son site de Saint-Maur-des-Fossés (Val-de-Marne). Un projet de 25 millions d’euros. A 90 %, la production sera exportée.

Une usine en pleine ville, un site ancien où s’enchevêtrent près de quinze bâtiments, de la vieille maison bourgeoise au préfabriqué : « Si nous avions appartenu à un groupe américain, il est très improbable que l’investissement ait été réalisé en France », surtout en pareil lieu, admet Olivier Schiller, le président de Septodont. « Mais nous, nous ne nous sommes même pas posés la question… »

Pour le petit-fils du fondateur, il était évident de rester sur place. « Nos unités de fabrication sont soumises à des normes très strictes, et inspectées par les autorités de santé du monde entier, souligne M. Schiller. Cela constitue une barrière forte qui limite la concurrence des pays émergents. C’est aussi pour cela que nous pouvons continuer à produire ici. »

L’excavatrice a donc commencé à creuser. En prenant soin d’épargner un vieil arbre, planté, dit-on, par le fondateur du groupe. Pas touche aux racines !

Lire aussi : Rochester et Commercy, « usines miroirs » de Safran

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