Jean-Luc Moudenc, maire de Toulouse et président de l'Association des maires de grandes villes, estime que la baisse de dotations de l'Etat aux collectivités territoriales va détruire des dizaines de milliers d'emplois.
L'Etat va réclamer un nouvel effort budgétaire aux collectivités territoriales. Entre 2015 et 2017, le gouvernement pourrait mettre en œuvre une baisse progressive de 11 milliards d'euros de budgets. Quelles en seront les conséquences ?
Jean-Luc Moudenc : Le risque, c'est que dès 2015 on assiste à une chute drastique des investissements des collectivités. La plupart des maires ont été élus sur l'engagement de ne pas augmenter les impôts, les élus doivent également être d'une très grande prudence concernant l'endettement de leur collectivité. Enfin, concernant le fonctionnement, même en serrant tous les boulons, nous avons peu de marge de manœuvre. Le seul volant que nous pouvons actionner, c'est le budget d'investissement. Les métropoles prévoient pour 2015 une baisse de 15 % à 40 % de leurs investissements.
Alors que les Français attendent une politique au service de l'emploi, le gouvernement dessine le contraire. La Fédération nationale des travaux publics a déjà tiré la sonnette d'alarme en chiffrant une perte de près de 60 000 emplois si le gouvernement maintient ses coupes. Les PME seront les premières victimes de ces destructions d'emplois.
Etes-vous favorable à la fin des départements et à la prise en charge de leurs compétences, dans les zones urbaines, par les futures métropoles comme le prévoit le projet de réforme territoriale du gouvernement ?
Oui ! C'est une réelle mesure de simplification contre l'enchevêtrement des compétences des collectivités territoriales. Toutefois, il est nécessaire que les règles de transfert des compétences soient éclaircies. Il faut également que les métropoles sachent exactement ce qu'elles vont devoir assumer comme nouvelles charges et avec quelles recettes nous serons en mesure de les gérer. Sur le principe, je suis donc favorable, mais je demeure méfiant en ce qui concerne les modalités de ce transfert, surtout que nous ne savons rien des intentions du gouvernement.
La loi de modernisation de l'action publique territoriale et d'affirmation des métropoles (modernisation de l'action publique territoriale et d'affirmation des métropoles) du 27 janvier permet déjà à la future métropole lyonnaise cette expérience institutionnelle. Elle met en place en ce moment une fusion du conseil général du Rhône et du Grand Lyon, est-ce le modèle à suivre ?
C'est en effet une expérience positive. Je souligne que c'est le fruit d'un accord local entre le conseil général et l'agglomération lyonnaise, le gouvernement n'a fait que le valider. C'est un bon modèle d'accord trouvé entre un territoire urbain et un autre rural. Je plaide pour que les autres métropoles s'en inspirent. Aujourd'hui, l'expérience lyonnaise montre la voie sur les modalités des transferts de compétences qui ont été opérés entre les deux collectivités, alors que le projet de loi gouvernemental ne donne aucune piste. La formule la plus simple eut été de s'en inspirer.
Avez-vous voté la loi Mapam ?
Non. J'ai déposé des amendements pour une extension du modèle lyonnais aux autres agglomérations. Ils n'ont pas été retenus, je ne me voyais pas voter le texte en l'état.
Les métropoles devront partager les compétences économiques avec les futures régions. Comment les deux types de collectivités doivent-elle se coordonner ?
Là aussi, il est nécessaire que le gouvernement apporte des réponses claires. Il faut accorder aux régions et aux métropoles des compétences clairement différentes pour éviter conflits et chevauchements dans l'action des exécutifs territoriaux. Pour éviter les tensions contre-productives, il est impératif d'empêcher qu'une collectivité ait la main sur les actions que doit mener l'autre. Les schémas de développement économique et d'innovation doivent être élaborés par les métropoles avec les régions. Il n'est pas question que la région dessine un schéma prescriptif que les autres collectivités n'auraient plus qu'à suivre.
L'autre volet de la réforme territoriale prévoit notamment la fusion de Midi-Pyrénées, modernisation de l'action publique territoriale et d'affirmation des métropoles, avec Languedoc-Roussillon. Soutenez-vous ce projet ?
Pourquoi pas, mais j'aurais préféré que le gouvernement me pose la question avant de décider d'un redécoupage. La manière dont cette réforme a été initiée par des arrangements très politiques entre le président de la République et ses camarades présidents de régions, dans un bureau, un soir à l'Elysée me semble périlleux.
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