Coup dur pour François Hollande et son équipe. En annonçant vouloir mettre fin l’an prochain aux abattements pour durée de détention, qui permettent au bout de 30 ans d’être exonéré d'impôt sur les plus-values réalisées sur les ventes de terrains à bâtir, le gouvernement espérait encourager les propriétaires à vendre au plus vite et ainsi créer le fameux "choc foncier", cher au candidat socialiste. Las, la mesure va en réalité produire exactement les effets inverses et encourager la rétention…

Les notaires que nous avons interrogés sont unanimes : le durcissement programmé de la fiscalité sur la cession de foncier n’a, pour le moment, déclenché aucune intention de vendre. Bien au contraire ! "Redoutant le coup de bambou, un nombre significatif de propriétaires, qui voulaient vendre, reviennent désormais sur leur décision. Cette mesure ne va faire qu’aggraver la pénurie de foncier, en totale contradiction avec la politique menée par Cécile Duflot", juge Thierry Thomas, président de l’Institut du droit de l’immobilier. Autre conséquence, plus surprenante, de cette annonce : "plutôt que de céder leurs terrains, certains particuliers préfèrent, dans ce contexte, réaliser des donations à leurs enfants, ce qui permet d’éviter la taxe sur la plus-value", ajoute Christian Godard, notaire à Claye-Souilly en région parisienne.

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Comment en est-on arrivé là ? Pour les professionnels de l’immobilier, la majorité paie tout d’abord une communication désastreuse, couplée à une absence de cap politique clair. Officialisée tardivement lors de la présentation du projet de loi de finances, la date d’entrée en vigueur du durcissement de la fiscalité fait depuis l’objet d’un véritable feuilleton parlementaire rendant la mesure totalement illisible. Initialement programmée au 1er janvier par le gouvernement, la date butoir de la suppression des abattements a d’abord été repoussée au 1er mars par les députés en première lecture du projet de loi de finances. Les sénateurs ont ensuite retoqué l’ensemble du dispositif… qui devrait, sauf coup de théâtre, être adopté par les députés en deuxième lecture, comme il avait été voté lors du premier passage du texte à l’Assemblée (c’est-à-dire avec une date butoir au 1er mars). "Bref, un flou artistique fiscal, qui n’est jamais bon pour l’immobilier", résume le notaire Thierry Thomas.

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Ce n’est pas le seul frein. Que l’échéance soit fixée au 1er janvier ou au 1er mars, il est déjà trop tard pour tenter de vendre et échapper au tour de vis. "Entre le compromis et la signature définitive, une vente de terrain peut prendre jusqu’à 12 mois, car elle est en effet soumise à l’obtention du permis de construire de l’acheteur, une procédure longue et complexe", note Guy Nafilyan, président du promoteur Kaufman & Broad. Constat d’autant plus réaliste que les promoteurs immobiliers ont largement réduit la voilure pour faire face à la baisse du nombre d’acheteurs…

Guillaume Chazouillères