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Les dix questions auxquelles François Hollande doit répondre

La conférence de presse du président, mardi après-midi, est à haut risque. Des explications sur le «pacte de responsabilité», les économies et... sa vie privée sont très attendues.

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Francois Hollande lors de sa première conférence de presse semestrielle.

Par Pierre-Alain Furbury, Vincent Collen, Frédéric Schaeffer, Derek Perrotte, Laurence Albert, Thibaut Madelin, Alain Ruello, Leïla de Comarmond

Publié le 13 janv. 2014 à 19:25

Il avait repoussé l’exercice, initialement prévu en novembre, dans l’attente d’un climat un peu apaisé. Las. C’est un François Hollande sous très forte pression qui aborde, mardi après-midi à l’Elysée, devant quelque 600 journalistes français et étrangers, la troisième grande conférence de presse du quinquennat. Le rendez-vous est plombé par les révélations de la presse people sur sa vie privée. La Première Dame, Valérie Trierweiler, était toujours hospitalisée ce lundi, « pour une période indéterminée », trois jours après la publication d’un article faisant état d’une liaison entre le président et la comédienne Julie Gayet.

François Hollande avait déjà, sans cette affaire, bien du pain sur la planche. Cette conférence de presse est cruciale pour lui. Elle avait initialement été conçue pour être le point d’orgue de sa contre-offensive de début d’année, après un automne marqué par la fronde fiscale et les ratés de l’affaire Leonarda. Embourbé dans l'impopularité, le chef de l’Etat doit expliquer et préciser le « pacte de responsabilité » proposé aux entreprises : « moins de charges sur le travail (...) et, en contrepartie, plus d’embauches et plus de dialogue social ». Ainsi que les économies qu’il a promis, la réduction des dépenses étant sa seule marge de manoeuvre depuis qu’il a annoncé une « pause fiscale ». Pour beaucoup, ce sera le plus dur. « Il va falloir aller fouiller million par million. Je ne vois pas comment il va faire. Déjà que j’ai du mal dans ma mairie », soupire un socialiste.

Les proches du président savent que les prochains mois vont « secouer ». Mais espèrent « une prise de conscience, chez les Français, que l'on ne fera plus comme avant ».

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1. Quelle ampleur pour la baisse des charges ?

Dans ses vœux aux Français, le 31 décembre, le chef de l’Etat a promis qu’il y aurait « moins de charges sur le travail ». Sans plus de précision. Le gouvernement envisage de réduire les cotisations qui financent la branche famille de la Sécurité sociale, acquittées par les seuls employeurs. Elles représentent 35 milliards d’euros. Les entreprises et les syndicats veulent maintenant connaître l’ampleur de la baisse. 5, 10 milliards ? A quel rythme ? Sauf surprise, François Hollande ne devrait pas donner de chiffre précis mardi après-midi. « Ce serait imprudent, le chantier de la réforme vient seulement d’être lancé », confiait-on ce lundi au sein de l’exécutif. Le patronat a cependant bon espoir que le chef de l’Etat s’engage à ce que la baisse commence dès 2015. Il devrait détailler pourquoi il choisit cette voie pour améliorer la compétitivité des entreprises et faire reculer le chômage. Et réaffirmer que cette baisse de charges ne sera pas compensée par d’autres prélèvements mais par des économies.

2. Y aura-t-il des contreparties imposées aux entreprises ?

La question des contreparties au « pacte de responsabilité » est un sujet ultra-sensible pour les syndicats comme pour la gauche. Lors de ses vœux, François Hollande n’a rien livré de ses intentions sur le sujet, sous-entendu par la notion même de « pacte  ». Côté CGT comme FO, on ne croît pas à un donnant-donnant entre l’Etat et le patronat. La CGT y voit un choix « clairement assumé de favoriser les cadeaux aux actionnaires ». FO estime qu’une mesure générale de baisse du coût du travail est par essence non assorti de contraintes. Moins fermée, la CFDT ne rejette pas le pacte, mais à condition qu’il y ait des contreparties en termes d’emploi, de salaires, sans « mano a mano » entre l’Etat et le patronat. Le président est très attendu sur la question de la formalisation d’un engagement ferme sur l’emploi et sur les salaires.

3. Dans quelles dépenses tailler pour trouver les économies promises ?

L’objectif ne cesse d'être relevé : après les 15 milliards d’euros d’économies du budget 2014, 50 milliards supplémentaires devaient être trouvées de 2015 à 2017 pour réduire le déficit. Ce total devrait grimper pour compenser les baisses de charges du « pacte de responsabilité ». Où les trouver ? François Hollande est resté peu précis sur ce point : « Nous devons faire des économies partout où elles sont possibles », a-t-il indiqué le 31 décembre. L’Etat (et ses opérateurs), la Sécurité sociale et les collectivités locales seront mis à contribution. Les discussions entre Bercy et les différents ministères débuteront fin janvier-début février avec l’objectif que chacun ait une idée assez précise de l’effort à réaliser mi-avril. La politique du logement, des aides aux entreprises et surtout l’assurance-maladie sont dans le viseur de l’exécutif, pour qui le temps du « rabot » est révolu.

4. Faut-il s’attaquer au millefeuille des collectivités?

Elu local de longue date, François Hollande ne saurait l’ignorer : rationaliser la gestion des collectivités locales est à la fois un impératif financier en période de « ras-le-bol fiscal » et un exercice risqué alors que se profilent les élections municipales en mars et les régionales l’an prochain. Les élus défendent leur chasse gardée avec énergie, en témoigne la difficulté du gouvernement à faire adopter l’an passé sa première réforme de la décentralisation. En 2011, la droite avait perdu le Sénat après avoir imposé la création du conseilleur territorial, remplaçant les conseillers généraux et régionaux. Le chef de l’Etat reste très attaché à l’échelon du département. En revanche, la deuxième loi sur la décentralisation prévue pour avril devrait « clarifier » les compétences de chaque collectivité. En clair, éviter les doublons. Les collectivités sont déjà à la diète avec 1,5 milliard de dotations en moins en 2014 et en 2015. De nouveaux efforts devraient leur être demandées. Ce sera un des objets du rapport commandé par l’Elysée à Alain Lambert et Martin Malvy.

5. Comment remettre à plat la fiscalité des ménages et des entreprises ?

C’est un vaste chantier lancé par Bercy et Matignon à l’automne 2013, sur lequel le président est très attendu. Le gouvernement souhaite remettre à plat la fiscalité des ménages et des entreprises, afin de la simplifier, voir de l’alléger à moyen terme. Les premières mesures doivent figurer dans le budget 2015. Côté entreprises, le chantier devra s’articuler avec la baisse des charges, et le contenu de la réforme reste encore flou. Quelques grands sujets comme la fiscalité locale, l’impôt sur les sociétés ou les taxes affectées, seront passés au crible. Côté ménages, l’objectif reste la simplification de l’impôt, la piste du prélèvement à la source étant poussée par de nombreux élus et poids lourds du gouvernement, qui ne veulent cependant pas d’une fusion de l’impôt sur le revenu et de la CSG. Le comité de pilotage de la remise à plat de la fiscalité, qui comprend ministres et parlementaires, se réunira le 22 janvier.

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6. Comment enfin gagner le pari de l’inversion de la courbe du chômage ?

C’était sa « priorité » en 2013, c’est sa « priorité » en 2014. François Hollande continue de courir après une inversion de la courbe du chômage, attente première des Français. Problème : les réponses apportées jusqu’ici ne suffisent pas. Un recours massif aux contrats aidés ( emplois d’avenir, contrats de génération, etc.) a certes permis de contenir le chômage ces derniers mois, en premier lieu des jeunes, esquissant ainsi au forceps une stabilisation. Mais la situation budgétaire interdit d’accélérer encore le rythme et faute d’une croissance suffisante (0,9 % prévus cette année), les créations de postes ne semblent pas à même de prendre le relais, d’autant que la population active continue de croître. Dans ce contexte, l’exécutif a plus que jamais besoin de forcer le destin en poussant à une reprise des embauches via le « pacte de responsabilité » proposé aux entreprises, et via des réformes soutenant l’activité.

7. Où en est sa relation avec Valérie Trierweiler ?

C’est peu dire que la une d’un magazine people sur sa liaison supposée avec l’actrice Julie Gayet est tombée, pour lui, à un très mauvais moment. Elle a déjà parasité sa conférence de presse, qu’il souhaitait consacrer au fond, donc – insiste l’Elysée – « à la France ». « Désastreux pour l’image de la fonction présidentielle », a tranché Jean-François Copé, le patron de l’UMP. Le chef de l’Etat est contraint de clarifier au plus vite sa situation aux yeux de l’opinion, sa tâche étant encore compliquée par l’annonce de l’hospitalisation, vendredi, de sa compagne, Valérie Trierweiler. « Il doit le faire une fois, fort, définitivement et qu’on n’en parle plus », a insisté Thierry Mandon, le porte-parole des députés PS. La première dame n’a aucun rôle institutionnel mais elle a une fonction symbolique et dispose, à l’Elysée, d’un chef de cabinet, d’une chargée de mission et de deux secrétaires qui se relaient. Un officier de sécurité l’accompagne aussi dans ses déplacements. Soit un coût de près de 19.700 euros par mois.

8. Le Premier ministre a-t-il encore sa pleine confiance ?

François Hollande ne l’a pas cité une seule fois dans ses vœux de Nouvel An. Ni par son nom ni par sa fonction. C’est peu dire, donc, que les proches de Jean-Marc Ayrault – que beaucoup disent partant après les élections européennes – sont impatients d’entendre ce que le chef de l’Etat dira mardi de son Premier ministre. Dans ses deux précédentes conférences de presse, il s’était à chaque fois appliqué à lui renouveler sa « confiance », multipliant les qualificatifs élogieux. Mais depuis le début de l’année, François Hollande a donné le sentiment de vouloir reprendre fortement la main. « Remettre un peu de gaz ne fera pas de mal », glisse un proche. Le signe d’une détérioration de leurs relations après l’annonce de la réforme fiscale et la publication, sur le site de Matignon, d’un rapport controversé sur l’intégration ? Un ministre proche du président parle toujours d’une « vraie fluidité » entre les deux hommes, tout en notant que « le bicéphalisme de la Ve République crée des situations violentes ».

9. Le couple franco-allemand va-t-il repartir de l’avant ?

« Je prendrai donc, dès le printemps prochain, des initiatives avec l’Allemagne pour donner plus de force à notre union », a déclaré François Hollande lors de ses vœux du 31 décembre. Le prochain Conseil des ministres franco-allemand, prévu le 19 février, pourrait en donner les pistes et compléter la contribution commune du 30 mai dernier. Mais la réelle attente de l’Allemagne porte sur la santé de la France. Angela Merkel a pris note des réformes engagées par le gouvernement Ayrault, mais la chancelière attend plus d’audace, sans le dire officiellement. Une orientation plus libérale pour le quinquennat ne pourrait que la rassurer, à condition qu’elle soit suivie de décisions concrètes. S’il voulait donner un gage de confiance supplémentaire à la chancelière, avec qui sa relation a jusqu’ici été tendue, François Hollande pourrait déclarer que l’Europe a besoin d’une Allemagne forte, même avec un excédent commercial élevé.

10. L’armée a-t-elle les moyens de ses interventions ?

En attendant de savoir si des troupes européennes vont être envoyées en Centrafrique, la France assume seule l’opération Sangaris. Il est trop tôt pour avoir une idée de la facture, mais ce qui est certain c’est qu’elle n’a pas été prévue dans le budget 2014 des opérations extérieures (Opex). Il faudra donc que l’ensemble des ministères mettent la main à la poche, en vertu de la clause dite « de solidarité ». Sachant que l’exécutif devra probablement faire face à d’autres dépenses non prévues (prestations, etc.), la Défense elle-même sera mise à contribution au prorata de son poids dans le budget. C’est ce qui s’est passé en 2013. Du fait de l’opération Serval, il a manqué 580 millions pour les Opex. D’un autre côté, la Défense a dû faire une croix sur 500 millions pour financer sa part des crédits nouveaux nécessaires. Bon prince, Bercy a accepté que la Grande Muette puisse les récupérer cette année, mais sous forme de recettes exceptionnelles…

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