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Champ-de-Mars: Delanoë nie toute «manœuvre politique»

Selon un responsable de la logistique de la Manif pour tous, les barrières barrant l'accès aux pelouses avaient été retirées par la mairie juste avant la manifestation. CHARLES PLATIAU/REUTERS

Le maire de Paris, qui a envoyé une facture de 100.000 euros à la Préfecture de police après la Manif pour tous, avait prévenu que le gazon ne supporterait pas «une telle affluence».

Si le Champ-de-Mars est sens dessus dessous après la Manif pour tous, comme l'affirme la Mairie de Paris, il n'est pas le seul… Le «non-événement» qu'est l'envoi par Bertrand Delanoë d'une facture d'environ 100.000 euros à la Préfecture de police, qui a autorisé le rassemblement, commence à faire beaucoup de bruit.

«Lorsque la Préfecture de police et les organisateurs réfléchissaient aux tracés (…), j'ai prévenu que les pelouses du Champ-de-Mars, en cours de réfection pendant la période hivernale, ne supporteraient pas une telle affluence, rappelle Bertrand Delanoë dans un communiqué. Les services de la Ville ont pris connaissance lundi matin de l'étendue des dégâts, avec à la fois des travaux à refaire intégralement et une période d'indisponibilité des pelouses à prolonger jusqu'à juin, contre avril habituellement». Aucune «manœuvre politique» ne serait à imaginer derrière cette «demande légitime d'indemnisation au profit des Parisiens»: «Les raisons qui m'ont conduit à mettre en garde la Préfecture de police m'avaient amené il y a un peu plus d'un an à refuser à François Hollande, alors candidat, son utilisation pour un meeting», se justifie le maire de Paris.

À la préfecture, on explique que l'«on va examiner les conditions de recevabilité de cette demande». «Si la responsabilité de l'État devait être engagée, poursuit-on, on aurait une discussion technique pour évaluer les dommages.» La facture pourrait-elle ensuite être transférée aux organisateurs de la manifestation? Les services préfectoraux «imaginent que oui»…

«Un poids, deux mesures»

Selon un responsable de la logistique de la Manif pour tous, les barrières interdisant l'accès aux pelouses avaient été retirées par la Mairie juste avant la manifestation. Il était prévu «que l'intégralité du Champ-de-Mars, y compris les pelouses, soit utilisée, tout cela conformément au dossier technique remis aux autorités», précise le collectif. En outre, rappelle Albéric Dumont, le coordinateur de la manifestation, une armée de bénévoles s'est employée, dans la nuit de dimanche à lundi, à remettre les lieux en état. «Comme les volontaires n'étaient pas assez nombreux sous la pluie, précise-t-il, nous avons même fait appel à une société de nettoyage privée pour ramasser tous les confettis.» Inutile de préciser que le collectif, qui rentrera tout juste dans ses frais grâce à la quête de dimanche, ne pourra pas payer 100.000 euros… «On appelle les manifestants à venir replanter les brins d'herbe, a plaisanté mercredi Frigide Barjot, l'égérie du collectif. Mais les 100.000 euros, on n'a pas les moyens!»

Au Conseil de Paris, l'opposition s'est immédiatement offusquée de la démarche du «faux démocrate» Delanoë. «C'est un exemple effarant du sectarisme de Bertrand Delanoë, qui jamais ne déroge à sa ligne «un poids, deux mesures», s'indignent Jean-François Legaret et Philippe Goujon, au nom des élus UMP. En l'occurrence les manifestants pesaient sans doute plus lourd que ceux de SOS-Racisme, auxquels il avait prêté le Champ-de-Mars et alloué une subvention de 230.000 euros pour le concert du 14 juillet 2011. Mais le chantre de la gauche humaniste et démocrate est en réalité celui du sectarisme et de l'intolérance lorsque les choses lui déplaisent. La gauche n'est pas loin de la censure.»

Du côté de l'UDI, le sénateur Yves Pozzo di Borgo, élu du VIIe arrondissement, explique que, «dès 20 heures, dimanche soir, l'adjoint aux espaces verts (UDI) du VIIe arrondissement, René-François Bernard, a pu constater, aux côtés des services municipaux, que les lieux étaient très propres et que seules les pelouses situées devant la tour Eiffel étaient partiellement endommagées». «Nous ne comprenons pas que la Mairie de Paris, poursuit-il, fasse payer l'addition d'une lente dégradation du Champ-de-Mars, faute de moyens appropriés, aux organisateurs.»

Flagrant délit de contradiction

Président du groupe PCF-PG au Conseil de Paris, Ian Brossat réplique que «la droite est prise en flagrant délit de contradiction: c'est elle qui fut à l'initiative de la charte de protection du Champ-de-Mars… et c'est elle qui a appelé à manifester le 13 janvier! souligne-t-il. Les organisateurs de la manifestation homophobe doivent assumer leurs responsabilités et régler la note.»

La démarche de Bertrand Delanoë ne fait que relancer la polémique sur le nombre de participants à la manifestation de dimanche. «Comment si peu de manifestants ont-ils pu faire autant de dégâts?» s'amusent certains sur Twitter. D'autant que lors de précédents événements sur le Champ-de-Mars, qui avaient causé «beaucoup plus de dégradations», se souvient Bernard Loing, président de l'Association des amis du Champ-de-Mars, la Mairie de Paris ne s'était pas montrée si tatillonne.

D'après un article du Parisien du 15 juillet 2009, «700.000 spectateurs se sont rassemblés au Champ-de-Mars à Paris pour le méga-concert gratuit de Johnny Hallyday, selon la Préfecture de police». «En raison de l'affluence exceptionnelle attendue, la remise en état du Champ-de-Mars sera financée cette année par l'État pour les deux tiers et pour un tiers par la Ville», précisait encore le quotidien. Deux ans plus tard, c'était un concert de SOS-Racisme qui se tenait sur l'esplanade: «“Regardez ce Champ-de-Mars proche du million de personnes”, a lancé sur scène le président de SOS-Racisme, Dominique Sopo», écrivait l'AFP le 14 juillet 2011. L'association assure avoir reçu, après l'événement, une facture de la mairie de Paris: «c'était même assez cher pour des géraniums!» ironise l'attachée de presse de SOS-Racisme. Combien exactement? Mercredi soir, ni elle ni les services de la Mairie de Paris n'avaient retrouvé cette facture.

Plusieurs lecteurs «outrés par cette mesquinerie» ont contacté Le Figaro pour savoir comment aider le collectif de la Manif pour tous. «Cela ne fait que renforcer le vent de colère et l'attachement à notre mouvement, témoigne Emmanuel, l'un des organisateurs. On reçoit depuis dimanche des appels de toute la France, de gens écœurés par les chiffres visiblement politiques de la Préfecture de Paris. Il y a une énorme attente sur la suite que l'on donnera à cette manifestation.»

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