Certains des avantages fiscaux dont bénéficient les classes moyennes et supérieures sont visés par le gouvernement. Après les allocations familiales en début de semaine, il est désormais question de plafonner voire de supprimer la demi-part fiscale dont bénéficient les parents des étudiants de moins de 25 ans. Parmi divers scenarii, le gouvernement étudie la possibilité de financer la création d’une «allocation d’études» sous conditions de ressources grâce à la suppression de cette aide sociale indirecte qui coûtait 1,2 milliard d’euros à l’État en 2012.

Après avoir reçu le syndicat étudiant Unef mercredi matin, la ministre de l’Enseignement supérieur Geneviève Fioraso a annoncé le lancement de consultations avec les syndicats étudiants pour mettre en oeuvre cette «allocation d’études», une promesse de campagne de François Hollande qui sera mise en place «à budget constant» .Le président jugeait l’an dernier que les bourses aux étudiants étaient «insuffisantes pour permettre aux enfants dont les parents ont des revenus modestes de poursuivre des études supérieures». Cette allocation d’études vise à réduire le nombre d’étudiants qui travaillent plus d’un mi-temps à côté de leurs études.

Mise en place d’une allocation d’études par redéploiement

Dans un contexte budgétaire extrêmement contraint, la ministre a néanmoins rappelé que la mise en place de l’allocation d’études se ferait grâce au redéploiement «des aides fiscales, des aides sociales et des bourses» existantes. Les consultations des représentants des étudiants vont commencer cette semaine et un «point d’étape» sera dressé fin mars, a précisé le ministère. Les allocations logement (APL et ALS) ne seraient pas concernées car elles sont «un droit universel auquel on ne touche pas», a dit Geneviève Fioraso.

Ce sujet étant trop délicat en raison du coût du logement en France, et puisque le gouvernement n’entend pas dégager une nouvelle ligne budgétaire, il ne lui reste plus qu’à s’attaquer à la demi-part fiscale. «Nous souhaitons que cette dernière soit réinjectée dans les aides sociales étudiantes», précise ce mercredi au Figaro Emmanuel Zemmour, le président de l’Unef, «c’est la seule solution pour augmenter le montant des bourses et le nombre de boursiers». L’objectif du syndicat est d’atteindre un taux de 50 % d’étudiants touchant une bourse, contre 30 % aujourd’hui. «La mobilisation de la dépense fiscale à destination des familles permettrait pratiquement de doubler le montant global des bourses sur critères sociaux», indiquait le parlementaire Le Déaut le mois dernier dans un rapport remis au premier ministre.

La suppression de la demi-part fiscale, vieille revendication de Bercy

L’UNI-MET, syndicat étudiant proche de l’UMP, s’insurge contre ce projet: «Le gouvernement s’apprête à financer sa hausse du montant des bourses sur critère sociaux par la suppression de l’une des seules aides dont bénéficient les étudiants qui ne sont pas boursiers. L’UNI-MET refusera ce tour de passe-passe clientéliste consistant à déshabiller les étudiants des classes moyennes pour financer la hausse des bourses sur critères sociaux.» Mais au cabinet de Geneviève Fioraso, on se montre pour l’instant très prudent concernant les affirmations de l’Unef…

La suppression de la demi-part fiscale est une vieille revendication de Bercy et n’est pas l’apanage de la gauche. François Baroin, alors ministre du budget avait annoncé sous le gouvernement précédent que les étudiants et leurs familles allaient devoir choisir entre bénéficier d’une demi-part fiscale (pour enfant à charge) ou d’une aide au logement (si l’étudiant a quitté le foyer), espérant 400 millions d’économie. L’annonce avait provoqué un tollé. Tous les syndicats étudiants mais aussi des associations familiales avaient dénoncé ce coup porté aux familles et le gouvernement avait reculé.

Alors député UMP, Laurent Wauquiez avait lui-même fustigé en 2006 dans un rapport l’iniquité que représente la demi-part fiscale: «Un étudiant de famille très modeste peut prétendre à une bourse pour le financement de ses études. À l’autre bout de l’échelle socio-professionnelle par le biais de la demi-part fiscale, les ménages plus aisés voient les coûts d’études compensés. Mais entre les deux les classes moyennes sont livrées à elles mêmes avec des situations particulièrement choquantes. Certes le plafonnement de l’avantage de la demi-part fiscale permet de limiter le caractère socialement inéquitable de celle-ci mais il demeure néanmoins choquant. En réalité le problème qui se trouve ainsi posé n’est pas tant celui de la demi-part en tant que tel dont la logique - compenser pour les familles notamment nombreuses le coût des études des enfants - reste pertinente dans une volonté d’encourager les familles à avoir des enfants, mais bien plutôt les aberrations du système fiscal français.»