Les députés socialistes, unanimes sur le mariage et l'adoption pour les couples homosexuels, sont en revanche divisés sur la procréation médicalement assistée (PMA). Lors d'une réunion de groupe, mercredi 19 décembre, ils ont voté pour le dépôt d'un amendement la concernant lors de la discussion du projet de loi, début 2013, sans exclure l'intégration de cette mesure dans un autre texte.
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Mardi matin, la réunion du groupe socialiste, qui recevait les ministres Christiane Taubira (justice) et Dominique Bertinotti (famille), a donné lieu à des "débats passionnés" sur la question de la PMA, selon les termes employés par le député de l'Essonne Jérôme Guedj.
Alors que le gouvernement a strictement limité son projet de loi au mariage et à l'adoption pour les couples homosexuels, le chef de file des députés socialistes, Bruno Le Roux, clame depuis plusieurs semaines qu'il a "bon espoir" d'intégrer l'amendement sur la PMA. En clair, de donner aux couples de femmes homosexuelles mariées la possibilité de bénéficier de cette technique. François Hollande a semblé donner carte blanche la semaine dernière au Parlement, en soulignant qu'il lui reviendrait de se prononcer "souverainement" sur le sujet.
"LES ESPRITS NE SONT PAS SUFFISAMMENT MÛRS"
Le groupe socialiste paraît divisé sur la question et de nombreux députés ont fait état, mardi en réunion de groupe, de leurs réticences. Christiane Taubira a d'ailleurs qualifié mardi après-midi, devant la commission des lois de l'Assemblée, l'amendement de "virtuel pour l'instant" et de "putatif". En premier lieu, Alain Claeys, spécialiste des questions de bioéthique au PS. Pour lui, s'il est légitime d'ouvrir la PMA, jusque-là réservée à des raisons médicales, à "des raisons sociétales", une question de cette importance "ne peut être traitée par un simple amendement".
Il considère qu'il faut ouvrir "l'ensemble de ce débat sociétal", y compris en abordant la question des couples homosexuels masculins, mais dans le cadre d'une révision des lois de bioéthiques. "Par excès de précipitation, on risque de jeter la confusion", a-t-il averti. Des arguments qui sont aussi ceux d'Olivier Faure, un proche du premier ministre. "Si demain, dit-il, nous voulons ouvrir la PMA pour des raisons sociétales, nous pouvons éventuellement l'envisager, mais cela suppose un débat." Pour lui, "les esprits ne sont pas suffisamment mûrs. Il faut renvoyer cette question-là à la révision des lois bioéthiques elles-mêmes". Quant à l'ex-garde des sceaux Elisabeth Guigou, elle a estimé qu'il serait "dommage" de traiter de la PMA "de cette manière, par le biais d'un amendement". "Cela soulève des questions de fond qu'il convient de discuter dans un projet de loi spécifique", a-t-elle ajouté.
L'AMENDEMENT DÉPOSÉ
Reconnaissant des "réticences" sur le sujet, Pouria Amirshahi a lancé dans les couloirs de l'Assemblée : "Si elles se confirmaient, ce débat serait mis plus tard, à un autre moment, et à la limite, ce n'est pas plus mal", jugeant "plausible" un report à un autre texte. Mais Corinne Narassiguin, députée des Français d'Amérique du Nord, jugeait sur Twitter que ne pas insérer la PMA dans le texte de loi serait faire "la politique de l'autruche". Quant à Bernard Roman, député socialiste et partisan de l'intégration de la PMA dans le texte, il a démenti mardi que l'amendement puisse être abandonné.
Mercredi, lors d'une réunion de groupe, les députés socialistes ont finalement décidé de déposer l'amendement sur la PMA lors de la discussion du projet de loi sur le mariage et l'adoption pour les couples homosexuels. Les députés socialistes se sont prononcés en ce sens par 126 voix contre 61 et 9 abstentions, lors d'un vote à main levée.
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