Tesson : un socialiste n'est jamais coupable

Prise la main dans le sac, la majorité entonne le couplet de la moralisation de la politique et s'exonère de toute responsabilité. Philippe Tesson explose de colère.

Par

Après l'affaire Cahuzac, des voix s'élèvent au sein du PS pour demander un référendum sur la moralisation de la vie politique. © Michel Stoupak / citizenside.com

Temps de lecture : 3 min

On n'aura pas été étonné que les socialistes, par la voix de leurs dirigeants, en tête desquels le chef de l'État, se dégagent de toute espèce de responsabilité dans l'affaire Cahuzac. "C'est une affaire individuelle, c'est un homme qui a failli", disait dès jeudi François Hollande. Depuis, toute la famille reprend en choeur ce refrain. Ils n'y sont pour rien. On savait depuis longtemps qu'un socialiste n'y est jamais pour rien. Un socialiste est un être immaculé. De nature. Une souillure ne peut pas être socialiste. Un socialiste est innocent, donc, Cahuzac n'est pas socialiste, et donc les socialistes ne sont pas comptables des crimes de Cahuzac, ils en sont victimes. Le Grand Pur Socialiste, le GPS qui gouverne la France, a rendu son jugement : ni lui-même ni son gouvernement n'ont "rien à voir avec l'affaire en question" (sic...).

Le Tout-Paris politique savait plus ou moins que Cahuzac n'était pas un enfant du Bon Dieu. De même, les milieux informés savaient que Jean-Jacques Augier, ami de longue date de Hollande et trésorier de sa campagne électorale, ne tirait pas son immense fortune d'un modeste commerce franchouillard. Seul François Hollande l'ignorait ! Le pauvre homme ! "Je ne connaissais rien des activités de M. Augier", affirme-t-il aujourd'hui. S'il dit vrai, tant de naïveté frise la sottise et signe l'incompétence. Sinon, il ment. C'est sans doute un peu les deux.

La newsletter débats et opinions

Tous les vendredis à 7h30

Recevez notre sélection d’articles tirée de notre rubrique Débats, pour comprendre les vrais enjeux du monde d’aujourd’hui et de notre société

Votre adresse email n'est pas valide

Veuillez renseigner votre adresse email

Merci !
Votre inscription à bien été prise en compte avec l'adresse email :

Pour découvrir toutes nos autres newsletters, rendez-vous ici : MonCompte

En vous inscrivant, vous acceptez les conditions générales d’utilisations et notre politique de confidentialité.

Stratégie de la défausse

Donc, le pouvoir a choisi, une fois de plus et comme on s'y attendait, la stratégie de la défausse. Nous avons été abusés, disent-ils, nous allons en tirer la leçon, cela nous donne raison, nous avions bien dit que la République devait être irréprochable, et "Moi, président de la République", je m'étais engagé à ce que sous mon règne elle le devienne. Mais que ne l'a-t-il pas fait depuis dix mois plutôt que de nous divertir avec son "mariage pour tous" ?

Nous allons entrer dans un cycle vertueux. De ce cataclysme que nous venons de vivre et qui n'est pas près de s'apaiser si l'on en croit les rumeurs, Hollande va tenter de faire une aubaine. L'occasion est inespérée. Déjà, on sent souffler un vent moral. Les diacres, les sacristains et les chaisières du parti entonnent les chants de la purification. À leur tête, le chef balayeur, toujours prêt à la croisade, Harlem Désir.

Tarte à la crème

On ne conteste pas ses intentions, mais il ne pouvait pas commencer plus mal, plus maladroitement, plus bêtement. Est-ce malin en effet, est-ce politiquement habile, est-ce opportun d'engager une opération de moralisation en divisant le peuple ? C'est au moment où la gauche est prise la main dans le sac qu'il attaque la droite, faisant une affaire politique d'une cause morale. "La droite, dit-il, ne s'est pas prononcée sur le sujet de la moralisation." N'importe quoi ! La moralisation est la tarte à la crème de toutes les familles politiques depuis la nuit des temps républicains. Tout le monde "se prononce" sur ce sujet, c'est tellement facile. Le problème n'est pas de se prononcer, mais d'agir. La gauche n'a pas davantage agi que la droite, pour preuve ce qu'a fait "Moi, président de la République" depuis dix mois, ou plutôt ce qu'il n'a pas fait. "Nous ne pouvons pas supporter, ajoute Harlem Désir, la surenchère antirépublicaine à laquelle se livre la droite." Où a-t-il vu cela ? Quelle surenchère depuis que l'affaire Cahuzac a éclaté ?

Et pour en arriver à quoi ce préambule agressif et diviseur, alors qu'une chance se présente pour qu'une réflexion collective et non partisane aboutisse à un consensus sur le sujet ? Pour arriver à une proposition stupide, celle d'un référendum dont la question serait : "Est-ce que vous voulez une République exemplaire ?" (sic...). Génial ! On a envie de répondre non si l'exemple est celui qu'ils donnent : celui de la bêtise, de l'arrogance et du mépris.

Consultez notre dossier spécial : référendum dont la question serait : "Est-ce que vous voulez une République exemplaire ?".

À ne pas manquer

Ce service est réservé aux abonnés. S’identifier
Vous ne pouvez plus réagir aux articles suite à la soumission de contributions ne répondant pas à la charte de modération du Point.

0 / 2000

Voir les conditions d'utilisation

Commentaires (140)

  • Contrevenant

    Mais le problème est qu'il ne s'agit pas recrutement mais d'élections...
    [...] Les élus condamnés, inéligibles un temps, se représentant le jour du terme de leur inéligibilité et ensuite réélus, c'est hallucinant, mais force est de constater que nous aimons ça...
    Il suffit d'appartenir à une famille politique, d'avoir un emblème sur son affiche, de taire ses 2/3 condamnations pour ABS et hop, on gagne des élections!
    L'affaire Cahuzac permettra peut-être de changer cela...

  • bleuet

    A toujours une double casquette, mais ne pourrions nous pas, engager les chômeurs hautement diplômés où formés, qui ne trouvent pas de boulot, ils sont disponibles, seraient utiles à notre société, pendant 5ans. Présents dans les débats, puisque ce serait leur unique occupation. Nous payons grassement le cumul des mandats, à des absents, ce que notre gouvernement autorise. Il serait bon que nos gouvernants réalisent que nous ne les supportons plus, et que la catastrophe est bien pour demain, ils sont trop nombreux à tout piquer et gérer dans leur intérêts propres, nous ne pouvons plus leur accorder notre confiance, même si ils ne sont pas tous des voleurs, vous avez trop tardé à faire le ménage [...] depuis 40ans [...]. Et se moquent des électeurs et des contribuables.

  • Mai

    Encore une fois vous avez vu juste et les derniers évènements vous donnent raison. Moi aussi j'explose de colère. Surtout quand je vois la droite tomber dans le panneau. Fillon, Le Maire et Wauquiez qui s'empressent de donner leur patrimoine. Hollande doit boire du petit lait car son enfumage est en train de réussir.

Abonnement Le Point