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Accueil Social, économie et politique Après les emplois-jeunes, les emplois-vieux

Après les emplois-jeunes, les emplois-vieux

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Avec le «zéro charges seniors», les plus de 55 ans vont subir la même imposture que les moins de 26 ans sur le marché du travail.

L'UMP fait mine de rétablir un semblant d'équilibre à son inique réforme des retraites en peaufinant son dernier dispositif en faveur de l'emploi des seniors (qui «coûtent trop cher» aux entreprises, dixit Laurent Wauquiez, et qui devront, pour la plupart, tenir jusqu'à 67 ans pour prétendre à une retraite à taux plein… ou au minimum vieillesse).

Or — les propos de Laurent Wauquiez le confirment —, l'emploi est une institution qui appartient aux employeurs et non aux salariés : donc, depuis des lustres, la panoplie de politiques publiques «en faveur de l'emploi» se traduisent par des mesures… en faveur des employeurs, quand bien même s'avèrent-elles aussi onéreuses qu'inefficaces, grévant les caisses de l'Etat par dizaines de milliards (32,6 en 2009, tous dispositifs confondus) pour un résultat affligeant.

Une obligation d'emploi de deux ans

L'article 16 du projet de réforme prévoit une exonération totale, pour une durée de douze mois, de cotisations patronales au niveau du Smic à toutes les entreprises qui embaucheront des candidats — sous-payés… — de plus de 55 ans, en CDI ou en CDD. Afin d'éviter un effet d'aubaine, l'entreprise pouvant être tentée de se séparer du salarié senior au bout d'un an, Christine Lagarde souhaite muscler le dispositif en instaurant une obligation d'emploi de 2 ans sous peine de devoir rembourser l'aide : elle est «en train de réfléchir à un mécanisme qui s’appliquerait pendant cette période d’une année, mais qui nécessiterait également que le salarié soit conservé une année supplémentaire. [...] Si d’aventure l’employeur avait besoin de licencier pour des raisons qui ne seraient pas économiques, on pourrait très bien envisager un rappel des cotisations pour non-respect de l’engagement de maintien du salarié senior dans l’emploi pour une durée égale au double de la période où il y a eu des exonérations de charges».

Outre les bouts de ficelles, vous remarquerez qu'elle parle de «charges» (et non de cotisations sociales), terme fallacieux par excellence mais que tout le monde a intégré dans son vocabulaire alors que les véritables charges patronales sont les dividendes distribués aux actionnaires, part qui est, pour l'entreprise, une charge ponctionnée sur sa valeur ajoutée et qui diminue ses capacités d'investissement.

Le CDD Senior… un flop qu'on n'a pas oublié !

Initié par l'inénarrable Dominique de Villepin et mis en œuvre par un décret datant du 29 août 2006, le CDD Senior (ou «emploi vieux»…) devait permettre aux salariés de plus de 57 ans d'acquérir, par leur activité, des droits supplémentaires en vue de la liquidation de leur retraite à taux plein. Ce contrat, l'un des plus longs ouverts aux employeurs pour l'embauche d'un senior, pouvait s'étaler sur 18 mois maximum et être renouvelé une fois, ce qui offrait une perspective de 36 mois de salariat.

Or, un an après, le CDD Senior (ou «contrat dernière embauche»…) n'aura permis qu'à une petite vingtaine de chômeurs de plus de 57 ans d'accéder à un emploi. Aujourd'hui, comme la plupart des initiatives ratées de l'ex Premier ministre et futur rival de Nicolas Sarkozy en 2012, il a été abandonné.

Certes, aucune offre promotionnelle lui était assortie, ce contrat n'ouvrant droit à aucune aide spécifique pour l'employeur. Le «zéro charges seniors» est nettement plus alléchant. Il est possible que ce graissage de patte incitera les entreprises à recruter à bas coût des vieux de plus de 55 ans alors qu'elles se débarrassent de leurs salariés dès l'âge canonique de 40 ans.

Le mensonge démographique

Il ne vous reste plus qu'à écouter attentivement cet entretien avec l'économiste et sociologue Bernard Friot pour Là-bas si j'y suis (à partir de 3/11) : il explique, notamment, comment on a créé un «problème des jeunes» sur le marché de l'emploi afin de le «résoudre» en cassant le salaire d'embauche — qui est actuellement inférieur de moitié à celui d'il y a 30 ans — et comment, aujourd'hui, lui succède symétriquement un «problème des vieux», à qui on va aussi opposer des petits boulots au Smic exonérés de cotisations sociales (car il vaut mieux se faire exploiter dans un petit boulot que de rester au chômage, n'est-ce pas ?) pour arriver péniblement jusqu'à la retraite.

En instaurant un problème générationnel sur le marché de l'emploi (jeunes, vieux), en y segmentant les populations exclues (handicapés, chômeurs de longue durée…) afin d'initier pléthore d'actions publiques de «réinsertion professionnelle» en faveur des employeurs, nos gouvernements successifs ont participé à la généralisation de la modération salariale entrée en vigueur depuis les années 80, quand la part des salaires dans le produit intérieur brut a chuté de 10 points au bénéfice du pouvoir actionnarial.

Pour rattraper/rembourser ce vol manifeste sur les fruits de la croissance générée par les acteurs de l'économie réelle, Bernard Friot propose non seulement qu'on en finisse avec les exonérations de «charges» et qu'on augmente les salaires (leur gel depuis 30 ans étant la cause profonde de la crise actuelle), mais surtout qu'on augmente chaque année de 0,5% le taux de cotisations patronales, elles aussi gelées depuis 1996. CQFD.

SH

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Mis à jour ( Mercredi, 23 Mars 2011 14:19 )  

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